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Entraide : choix ou nécessité

Par définition, l’entraide est une aide que l’on s’apporte mutuellement ; l’aide est elle-même selon le dictionnaire Larousse l’action d’aider quelqu’un, de lui donner une assistance momentanée, un appui ou un soutien.

Le mot entraide englobe des notions de don, de don de soi, de partage, et de service.

L’entraide porte sur un besoin financier, matériel, intellectuel ou de toute autre nature que ce soit. Elle rappelle la notion d’aller ou de se tourner vers l’autre, se détacher de sa propre condition pour considérer celle de l’autre. Nous vivons dans une communauté où les problèmes sociaux ou environnementaux nous concernent tous; par exemple : les grèves à l’école, l’enfant malade de la voisine, une pandémie comme celle de la covid19 a suscité un élan d’entraide à l’échelle mondiale et sans précédent (messages sur les gestes barrières, remèdes naturels…).

Pourquoi les gens aident généralement ?

Certains aident pour obtenir un retour. L’aide ou l’entraide a une portée spirituelle. De ce point de vue, on parle desemence comme le disent les livres saints. Et qui parle de semence parle également de récolte. Dans la Bible, le verset 6 du chapitre 9 de la 2ème lettre de Saint Paul aux Corinthiens dit :
« celui qui sème peu moissonnera peu, et celui qui sème abondamment moissonnera abondamment ».

Egalement le verset 261 de la Sourate 2 al-Baqara du Coran dit :

« Ceux qui dépensent leurs biens dans le sentier d’Allah ressemblent à un grain d’où naissent sept épis, à cent grains l’épi. Car Allah multiplie la récompense à qui Il veut … ».

Donc on peut donner dans l’attente cachée d’une bénédiction ou d’une faveur particulière.

Les anthropologues renchérissent en disant qu’il n’y a pas de don sans contre-don. Pour ces derniers, le don (entraide s’entend) n’est pas sans contrepartie : relationnelle, financière, ou même affective. C’est ce qu’explique la théorie de la triple obligation du don du sociologue français Marcel Mauss (1872-1950). Celui-ci conçoit le don non comme un geste désintéressé et sans contrepartie mais plutôt comme une action qui se décline en 3 obligations cyniques et implicites :

  1. Celle de donner
  2.  Celle de recevoir
  3. Celle de rendre

D’autres personnes aident parce qu’elles aiment se sentir utiles autour d’elles. D’autres encore parce que cela ne leur coûte pas beaucoup, en temps comme en argent comme en quoique ce soit d’autre. Ces personnes veillent à ne pas se priver et à ne toucher à rien qui puisse modifier leur style habituel de vie.

A contrario, notre expérience nous a démontré que pour mieux donner ou aider, il faut rechercher comme unique rétribution la satisfaction d’avoir fait le bien pour se rendre utile à sa communauté ou simplement pour l’amour du bien, la joie de redonner le sourire à quelqu’un, de le soulager de son angoisse. Comme au sport, c’est une action qu’il faut pratiquer régulièrement pour exercer son cœur à la compassion. Ainsi, à chaque fois que notre besoin de servir sera un peu plus comblé, nous aurons le sentiment de revivre, de reprendre des forces pour continuer davantage.

Comment se manifeste cette entraide ?

Les gestes d’entraide atteignent de nos jours un niveau très élevé. A titre individuel ou collectif, et de plus en plus, les hommes sont sensibles et solidaires de la souffrance de l’autre et apportent de l’aide. Cette entraide peut prendre un nom différent selon le milieu. En entreprise on parle de responsabilité sociétale des entreprises.

La responsabilité sociétale (ou sociale) des entreprises (RSE) est la prise en compte par celles-ci, sur une base volontaire, des préoccupations sociales et environnementales dans leurs activités et dans leurs interactions avec les autres acteurs, appelés « parties prenantes ».

La RSE trouve aussi une inspiration dans la philosophie « agir local, penser global » de René Dubos.

Les entrepreneurs privés bien que centrés sur la recherche de profit se sentent touchés par des questions d’intérêt communautaire. C’est le cas de l’homme d’affaires chinois Jack Ma, Président de Alibaba Group, le 1er site marchand en ligne, qui a récemment fait des dons à 54 pays africains de kits de test, de masques et de combinaisons de protection et écrans faciaux à usage médical.

Il dit et je cite :

« (…) Maintenant, c’est comme si nous vivions tous dans la même forêt en feu. En tant que membres de la communauté mondiale, il serait irresponsable de notre part de nous asseoir sur la clôture, de paniquer, d’ignorer les faits ou d’attendre de tomber pour agir. Nous devons agir maintenant ! »

Cet acte de solidarité internationale contribuera à arrêter la progression de cette pandémie dans nos nations endettées et dépourvues d’infrastructures sanitaires équipées. Il révèle l’interdépendance des êtres humains malgré les différences raciales ou ethniques. (…) L’entraide alors devient plus qu’une nécessité.

Même globe, même galère.

L’entraide se pratique aussi en communauté familiale, religieuse ou en association ; on parle de don, de sacrifice, ou d’aumône. Elle est caractéristique de notre culture africaine qui se veut encore chaleureuse et accueillante, même si elle est menacée par l’individualisme occidental qui s’infiltre à cause de la mondialisation. Cette forme d’entraide est celle que nous avons tous eu l’habitude de pratiquer et à laquelle je me suis attachée de tout mon cœur. (…)

Et nous ? Parvenons-nous à nous sentir concernés par les difficultés des autres ?

La drogue qui est consommée dans les établissements scolaires, Les femmes enceintes qui meurent en couche, les enfants qui vendent aux abords des routes au lieu d’avoir accès à une éducation scolaire, etc. Ce ne sont pas des sujets pour paraître bon. Ce sont des réalités que vivent d’autres personnes.

(…) Même globe, même galère.

Si vous vous demandez pourquoi je vous parle d’entraide au lieu de vous parler d’affaires ou d’entrepreneuriat. C’est d’abord parce que le sujet est bien d’actualité ; la crise sanitaire que vit le monde aujourd’hui ne connaîtra pas d’issue favorable sans entraide. Cette entraide consiste aujourd’hui à se confiner pour ne pas propager le virus si nous l’avons déjà contracté, ou pour ne pas l’attraper, et à respecter les gestes barrières. Voyez comment de façon solidaire les informations sur cette maladie fusent de partout, et combien sont partagées à travers les réseaux sociaux à la seconde. Nous vivons sur le même globe et nous vivons la même galère.

Même globe, même galère.

Ensuite, parce que c’est toute mon histoire.

D’un côté j’ai appris de mes expériences vécues. J’ai souvent bénéficié de l’aide, de la disponibilité, de l’amour des autres. Cela a suscité de la reconnaissance et de la motivation à en faire de même pour les autres. Chaque fois que j’en aurais la possibilité. J’y trouve une immense joie.

De l’autre côté, je tiens cette vocation de l’éducation reçue de mes parents. Ma mère était une personne ouverte et disponible pour les autres. Toujours prompte à rendre des services. Elle aimait être toujours entourée et avait toujours quelque chose à donner.

Mon père était également un bon éducateur et la transmission de son savoir était importante pour lui. Il se mettait avec joie au service de tous ceux qui le sollicitaient. Je faillirais à mon devoir si je ne léguais pas à mon tour cet héritage. C’est d’ailleurs pour leur rendre hommage de m’avoir inculqué la culture du partage et de l’entraide que la Fondation Marie-Anne et Zacharie pour l’Education a été créée avec le soutien de mes frères. C’est notre manière de les immortaliser.

La Fondation Marie-Anne & Zacharie pour l’Education en abrégé MAZE mène des actions en faveur de l’épanouissement des familles, de la femme et de l’enfant en Côte d’Ivoire et dans toute l’Afrique, à travers l’accès à de meilleures conditions d’éducation pour les enfants, et l’autonomisation des femmes et des familles.

Ses missions se résument en 4 points :

  • promouvoir la langue française ;
  • favoriser une meilleure orientation scolaire des élèves ;
  • favoriser l’apprentissage par la lecture chez les enfants ;
  • aider à l’autonomisation de la femme et à la promotion des droits de l’enfant.

Nous ne sommes jamais pauvres au point de ne rien pouvoir donner. L’entraide ne sera plus pour nous une simple option, mais bien une nécessité lorsque faire le bien rythmera les battements de nos cœurs ; une nécessité pour ces personnes que la vie a moins favorisé, et une nécessité vitale pour ceux qui dans certaines circonstances ont beaucoup plus à donner. Car la vie est un cycle où le donneur aujourd’hui peut devenir le receveur de demain.

Bintha Sanogo, Présidente-fondatrice Fondation MAZE

Extrait de sa conférence Facebook du 18 avril 2020

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